Contre la septoriose, la lutte continue

Comme la majorité des cultures, le blé est menacé par plusieurs maladies et parasites. L’ennemi numéro un est la septoriose. En l'absence de variétés résistantes, le recours aux traitements phytosanitaires est pour l'instant nécessaire. Mais la recherche continue. 

Septoriose sur feuille de blé © Arvalis-Institut du végétal- Nicole Cornec

Bien que peu présente au cours de ces deux dernières années, en raison de la sécheresse au printemps, la septoriose reste la maladie la plus préoccupante sur le blé. Elle est causée par l’attaque d’un champignon qui peut être présent au champ sous deux formes, Mycosphaerella graminicola ou Septoria tritici. La maladie sévit partout en France, et plus particulièrement dans la moitié nord et dans le Sud-Ouest. Tous les grands bassins céréaliers sont concernés. Le blé est l’espèce la plus touchée, seigle et triticale le sont plus occasionnellement.

Cette maladie peut entraîner une perte de rendement de 15 à 25 q/ha, qui peut atteindre 50 q/ha dans les situations les plus extrêmes. Les symptômes sont d’autant plus graves qu’ils apparaissent tôt en saison. Selon les années, selon les régions, les attaques peuvent être observées sur les premières feuilles formées avant l’hiver. Des taches marron, ponctuées de petits points plus sombres, sont caractéristiques de la présence du champignon. Au milieu de ces « pycnides » noirs, à la loupe, on distingue des filaments blancs, qui contiennent les spores.

Des dégâts aggravés par la chaleur et la pluie

Durant l’hiver, la progression de la maladie est ralentie par les conditions climatiques défavorables. Mais quand arrivent les beaux jours du printemps, les températures plus clémentes vont réactiver l’épidémie. En général, la maladie se propage du bas vers le haut de la plante. C’est la pluie qui va être le vecteur de l’infestation. A la faveur de l’humidité ambiante, les pycnides se gorgent d’eau, gonflent, éclatent, et les spores vont être expulsées. La dissémination vers les feuilles supérieures se fait via les éclaboussures. On parle de « l’effet splashing » des gouttes d’eau : elles rebondissent des étages foliaires inférieurs vers les étages supérieurs, mais sautent aussi vers les plantes voisines. En cas de précipitations violentes, les contaminations peuvent gagner deux étages d’un seul coup ! Au contraire, un temps sec va ralentir la progression. Ce qui explique les écarts de gravité selon les années. 

Comment combattre la maladie ? Bien sûr, des traitements fongicides sont disponibles. Mais la lutte chimique est difficile à mener. D’abord, depuis la mise en place du plan Ecophyto en 2009, les agriculteurs sont moins enclins à sortir leurs pulvérisateurs. Le recours aux produits phytosanitaires devient plus réfléchi et moins systématique. Autre raison, l’emploi répété de certaines molécules entraîne la résistance des champignons. Ils deviennent insensibles aux traitements.

Explication : les souches du champignon varient dans leur nombre, leur pouvoir pathogène, leur niveau de sensibilité aux fongicides et sont capables de muter, notamment sous l’effet d’une application répétée d’une même famille de molécules chimiques. Le traitement perd alors de son efficacité. C’est pourquoi il est toujours conseillé d’alterner les produits phytosanitaires.

La lutte préventive est à privilégier

Si l’on veut éviter la lutte chimique, en particulier pour les cultures bio, il est donc important de respecter de bonnes pratiques culturales.
- Le choix de la variété est le premier moyen de lutte agronomique (voir encadré). 
- Attention à la préparation de la parcelle. Si la culture précédente est une céréale, il faut veiller à enfouir les résidus de paille, susceptibles de porter des spores du champignon, pour éviter tout risque de contamination. Ce conseil vaut surtout pour les situations de rotation courte.
- Plus le semis sera tardif, moins la culture sera exposée à la période à hauts risques de la première contamination. Néanmoins, un semis tardif peut pénaliser le rendement.
- La propagation des spores étant favorisée par l’humidité mais aussi par le contact entre les feuilles, un bon compromis de densité de semis est à trouver pour ne pas obtenir un couvert trop important dans les premiers stades de la culture. On remarque également qu’un apport d’azote trop important entraîne une plus forte pression de la maladie.

Dans le cas où le traitement chimique s’avère indispensable, il faut le prévoir dès l’apparition des premiers symptômes, quand la maladie n’est détectée que sur les feuilles basses. Pour cela, l’institut technique Arvalis a mis au point un outil d'aide à la décision (OAD), Septo-Lis. Cet outil permet à l’agriculteur de choisir le moment opportun pour traiter, grâce à des conseils cartographiés pour chaque variété, en fonction de la date de semis et de la situation météorologique. 
Bien que les spécialistes aient réussi à accumuler au fil des années une multitude de données, ce champignon cache encore des secrets. Pour mieux lutter contre l’ennemi, il faut mieux le connaître. C’est pourquoi les recherches se poursuivent, et la voie de la génétique semble prometteuse.

Laure Gry
 

Aujourd’hui, le blé résistant à la septoriose n’existe pas. Ce n’est pas faute de recherches. Les sélectionneurs travaillent depuis longtemps dans cette voie. En attendant de disposer de variétés « résistantes », plusieurs variétés dites « tolérantes » sont inscrites au Catalogue officiel des espèces et variétés. Elles sont nommées ainsi car elles peuvent supporter le développement du champignon, sans que les désordres occasionnés compromettent leur croissance ou leur production. Des variétés de blé sont même vendues en mélange pour combiner les tolérances de chacune d’entre elles !
Dernièrement, un grand pas a été franchi. Des chercheurs de l’Inrae ont en effet identifié et caractérisé chez le blé un gène de résistance à la septoriose. Les programmes de recherche continuent, en association avec les établissements privés et publics. Patience, pour introduire ce gène dans une variété, il faudra encore du temps !
 

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