Les jardins pédagogiques d’Argenteuil, bien plus que des jardins !

Céline Augier

Depuis 27 ans maintenant, jardinage et pédagogie font bon ménage à Argenteuil. La ville ne compte pas moins de 50 jardins pédagogiques dont la grande majorité sont situés au sein même des écoles primaires et centres de loisirs. Au-delà des apprentissages, les jardins stimulent les échanges et la confiance entre les enseignants, les enfants et leurs parents, tous hypermotivés. Céline Augier, responsable des ateliers nature à la mairie d’Argenteuil nous parle de ces jardins pédagogiques chers aux élus de la ville. 

Céline Augier, responsable des Ateliers nature depuis 2004 à la mairie d’Argenteuil.  ©Mairie d'Argenteuil

Quelle est l’origine des jardins pédagogiques ?

Argenteuil est une des rares villes d’Île-de-France à gérer un centre horticole municipal et à produire les végétaux pour ses espaces verts. Pour valoriser le savoir-faire du centre et le patrimoine végétal auprès des habitants, la ville a créé en 1996 le service municipal d’éducation à l’environnement et deux jardins pédagogiques dans des quartiers à fort enjeu social. Le premier se trouve à Val d’Argent Nord au centre horticole et le second à Val d’Argent Sud. L’objectif est d’accueillir le public et les scolaires de la maternelle au CM2 au travers des ateliers nature. Aujourd'hui, les Argenteuillais.es connaissent bien les serres municipales et ces jardins, ils savent apprécier la richesse et la qualité des végétaux de leurs espaces verts. 

Que sont les ateliers nature ?

Chaque classe accueillie dans les jardins municipaux, 24 en 2023, dispose d’un bout de jardin dédié dont elle va prendre soin tout au long de l’année scolaire, du semis jusqu’à la récolte. Le jardin est un excellent support pédagogique pour des projets pluridisciplinaires s’inscrivant dans les programmes scolaires. Les enfants travaillent sur la géométrie, les mathématiques, les sciences de la nature. Ils développent aussi un savoir-être dans les débats et les prises de décision. Ils appréhendent le processus de démocratie. C’est aussi l’occasion pour les enfants, notamment, des familles issues de l’immigration d’enrichir leur connaissance du français. On leur apprend du vocabulaire précis, puis des expressions françaises, par exemple “avoir un cœur d’artichaut”. De retour en classe, les enseignants prennent appui sur le vécu commun pour travailler l’écrit et l’oral. Tout est propice à l’apprentissage. C’est une grande source de motivation pour les enfants comme pour les professeurs. Certains viennent même s’occuper du jardin pendant leurs vacances. 

J’ai lu qu’il y a des jardins au sein même des écoles ?

Les jardins sont devenus une base pédagogique incontournable pour les enseignants. À tel point qu’ils ont souhaité disposer d’un jardin dans leur école. Il y a aujourd’hui 48 écoles et centres de loisirs qui gèrent leur propre jardin en quasi-autonomie. Au démarrage, nous avons installé des palox remplis de terre pour constituer les potagers. Aujourd’hui, on débitume les cours d’école pour créer des parterres. Dans les projets de nouvelles écoles, les jardins pédagogiques sont systématiquement intégrés. Les jeux sont associés aux espaces végétalisés. Cette nouvelle vision de la cour d’école s'oppose aux conventions. Casser le terrain de foot du milieu, c’est casser les stéréotypes et le cloisonnement garçons filles. 

On peut dire que les jardins ont un impact social ?

Oui, nous mesurons un impact social fort et positif. Nous avons des classes d’enfants allophones qui ont souvent vécu des choses difficiles dans leur pays ou pendant le voyage vers la France. Ils supportent mal d’être enfermés dans une classe. Au jardin, l’échange, l’apprentissage et la confiance dans l’enseignant s’installent plus facilement. Certains parents viennent participer à l’entretien du jardin. D’autres sont accueillis pour apprendre le français en cours du soir. Dans les ateliers nature, les parents accompagnateurs, parfois en rupture sociale, découvrent les espaces verts et portent un autre regard sur la ville. Ils sortent de l’isolement et développent un lien positif à l’école et à l’enseignant. Ce sont de belles histoires et de riches expériences humaines. 

Que peut-on trouver dans ces jardins ?

Chaque jardin a sa personnalité en fonction des appétences du professeur et des projets pédagogiques. On peut y voir des céréales si un projet concerne le pain par exemple. La ville d’Argenteuil fournit les semences, les bulbes ainsi que les plants et les fleurs produits au centre horticole. Nous privilégions les espèces potagères en semis de pleine terre, qui se récoltent avant juin et qui peuvent se manger cru à l’école. Je pense aux fèves, petit pois, betteraves, oignons, radis. Leur cycle coïncide avec l’année scolaire. Les légumes d’été sont parfois cultivés quand les enseignants peuvent arroser pendant les vacances. Nous fournissons également les outils, du terreau et des fiches pédagogiques. La mairie d’Argenteuil soutient activement et est très attachée à ces jardins pédagogiques. 

Propos recueillis par Sabine Huet 

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